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02 Juil

Abobo: Elle accouche après 3 ans de grossesse ! l'histoire incroyable de mariam Zongo

A Abobo-Samaké, on n’avait jamais vu ça : une grossesse qui a duré plus de 3 ans ! L’histoire continue d’étonner tout le monde. A commencer par Mariam Zongo, la jeune femme à qui cette incroyable histoire est arrivée. Elle nous l’a racontée. Avec, à ses côtés, sa petite fille née au terme de cette longue aventure, où se mêlent le mystère et le miracle…

Samedi dernier, 11 mai. Nous sommes à Abobo. Mariam nous emmène faire d’abord un petit détour au salon de coiffure où elle travaille, puis, elle nous conduit à la maison, chez elle. Dès que nous entrons dans la cour, une petite fille vient vers nous en courant. C’est Leila, la fille de Mariam. La petite a un an. Une fillette normale, comme toute autre. A une différence près : l’enfant que nous avons sous les yeux a passé près de 4 ans dans le ventre de sa mère ! Incroyable, mais vrai !

Tout commence début 2009, lorsque Mariam Zongo, 24 ans, constate qu’elle est enceinte. C’est sa première grossesse. Après 4 mois, elle va faire une consultation prénatale. A l’hôpital, les infirmières l’examinent, et lui disent qu’elle n’est pas enceinte ! Mariam est d’autant plus étonnée que les tests de grossesse qu’elle avait fait au début de la grossesse s’étaient bien révélés positifs. Mieux, son ventre commence à s’arrondir déjà. «En plus de cela, j’étais souvent prise de nausées, de vomissements, de vertiges, etc.», affirme Mariam. Bref, tous les symptômes de la femme enceinte. Pour en avoir le cœur net, les infirmières lui suggèrent de faire une échographie. Mais les scanners ne décèlent rien. Pas la moindre trace de fœtus dans le ventre de Mariam. La jeune femme commence à s’inquiéter sérieusement.

De retour à la maison, Mariam explique la situation à Bibata, sa mère. Celle-ci recommande à sa fille de ne rien dire à personne pour l’instant. Par mesure de précaution, elles se donnent 7 mois pour savoir la vérité. «Pendant ce temps, je sentais des mouvements dans le ventre», affirme Mariam. Au cours de cette période pourtant, la mère et la fille vont assister à un phénomène étrange : certains jours, au réveil, Mariam constate que son ventre est redevenu plat. C’est-à-dire que la grossesse «disparaît», comme par enchantement. D’autres jours, elle réapparaît. Et ainsi de suite.

Dans le quartier, la situation de Mariam se remarque très vite, et naturellement, ça commence à jaser. A commencer par les gens de la cour commune qu’elle habite avec sa mère. L’affaire fait le tour du quartier. «Quand je passe, on me montre du doigt. Certains se moquent. Même au marché, les gens en parlaient ! On racontait par exemple que j’avais peut-être bouffé l’argent de quelqu’un qui m’a lancé un sort, etc.», raconte Mariam. Passés les 7 mois d’observation, elle fait à nouveau une échographie. Mais là encore, aucune trace de fœtus ! Après plusieurs échographies, les médecins lui recommandent de faire un traitement à l’indigénat. Afin de remettre le fœtus en place, au cas où celui-ci serait peut-être «caché» (on ne sait jamais !).

Mariam fait le tour des guérisseurs, féticheurs, marabouts… Tous sont unanimes pour reconnaître que son enfant est bel et bien là, dans son ventre. Sauf qu’aucun d’eux n’arrive à la faire accoucher, après plus de 12 mois de grossesse.

Le temps passe et le sort de Mariam ne s’améliore pas. Elle traîne son mal à la maison, évite de sortir à cause des railleries. «J’étais dépassée par cette affaire. On n’avait jamais vue une chose pareille», dit sa mère. Entre-temps, les ordonnances médicales s’amoncèlent. N’ayant plus de moyens pour faire face aux dépenses, la vieille dame (qui est vendeuse de condiments au marché) est obligée de s’endetter. Mariam n’a de soutien que sa mère. Son père est décédé. Epuisés financièrement, les rares soutiens de la famille ont fini par les abandonner. Certes, des âmes généreuses, ainsi que le copain de Mariam continuent d’apporter de temps en temps quelques vivres. Mais ce n’est pas suffisant. Mariam fait des travaux de bénévole à la mosquée où elle prie. Certains jours, pendant la grande prière, l’Imam demande aux fidèles d’adresser des bénédictions à la jeune femme. Les chrétiens aussi l’invitent à des séances de prière…

Plus d’un an après, Mariam apprend l’existence d’une guérisseuse très réputée vivant dans un village, près de Sassandra. Accompagnée de sa mère, elle s’y rend. Après 4 mois de traitement et 250.000 Frs dépensés en frais, il n’y a pas de changement. Mariam décide de rentrer à Abidjan. «A mon retour, la dernière échographie que j’ai faite, le médecin me dit que ce sont mes trompes qui ont pris du volume. Et qu’il faut faire un lavement de ventre. Je devais payer 70.000 Frs. Quand j’en ai parlé à mon copain, il a dit qu’il ne pouvait plus faire de dépenses. Qu’il était fatigué».

Le magasin où travaille Mariam appartient à un Pasteur. Un jour, ce dernier lui fait une révélation : «Il m’a dit qu’il a fait un rêve me concernant. Il m’a dit que j’étais enceinte, mais l’enfant que je porte a été bloqué mystiquement. Il m’a dit de ne pas faire le lavement de ventre dont m’a parlé le médecin, sinon je vais y laisser la vie. Car la personne à l’origine de mon mal aurait lié ma vie avec les médecins. Et c’est le traitement à l’hôpital qui allait servir de prétexte à ma mort», confie-t-elle.

Deux années passent. Et Mariam ne sait toujours pas à quel saint se vouer. Un jour, alors qu’elle est assise devant la cour, une jeune fille du quartier la découvre prostrée.

Elle me dit : «vieille mère, c’est comment ?» Je lui réponds : «ma petite, je souffre. On me dit que je suis enceinte. D’autre fois, on me dit qu’il n’en est rien. Je ne sais pas ce qui m’arrive». La jeune fille décide de conduire Mariam chez une guérisseuse. «On s’est rendu là-bas. C’est une vieille Tagbana. Quand la vieille m’a reçue, elle m’a demandé de me coucher et elle a posé sa main sur mon ventre. Dès qu’elle m’a touchée, elle m’a dit : eh, ma fille yako !». Ensuite, elle apprend à Mariam qu’elle est enceinte d’une fille. Avant d’ajouter: «quelqu’un a noué ton ventre mystiquement. Je ne peux pas te dire son nom. Mais ne t’en fais pas. Grâce à Dieu, je t’aiderai à mettre cet enfant au monde. Puis, elle m’a dit d’arrêter de dépenser et de suivre seulement son traitement».

En échange de 10.000 F CFA, la vieille femme lui prépare un médicament. Tous les 10 jours, Mariam doit se rendre chez elle pour le renouveler. Cela pendant 7 mois. «Lors du traitement, je faisais mes menstrues. Et lorsque mon ventre apparaissait, si tu me vois on dirait que je vais accoucher dans les minutes qui suivent», révèle Mariam. Au bout des sept mois, ses menstrues ont stoppé. Quand elle retourne voir la vieille, celle-ci lui dit : «ma fille, maintenant tu es enceinte !» Mariam s’écrie : «Ah bon ?» Et la vieille lui dit : «Oui, l’enfant est revenu à sa place. Dans 4 mois, retourne faire ton échographie». Après les 4 mois, Mariam se rend à l’hôpital des Sœurs d’Abobo pour l’échographie. Là, on lui apprend enfin qu’elle est enceinte de 4 mois ! Et c’est une fille ! «J’ai commencé à crier de joie dans l’hôpital. Les gens étaient étonnés et me demandaient ce que j’avais. J’ai expliqué que c’était un miracle, parce que cela faisait plus de trois ans que j’étais enceinte, mais on ne voyait pas l’enfant. Et c’est la première fois qu’on le voyait…» Mariam retourne aussitôt voir la vieille pour lui annoncer la bonne nouvelle.

Depuis cette date aussi, son ventre a cessé de faire les “va et vient”. Toutefois, la vieille continuait à lui donner des médicaments, en lui demandant de se rendre à l’hôpital afin de faire suivre l’évolution de la grossesse par les médecins. Le 16 janvier 2012, Mariam est enfin délivrée. Elle accouche. Sa fille Leila vient, après près de 4 années d’un long chemin de croix.

• Mariam, pourquoi as-tu voulu faire ce témoignage ?

- J’ai voulu le faire parce que des gens ont dit que ce n’est pas possible qu’une telle chose arrive. J’ai voulu témoigner pour dire que Dieu est capable de tout. Même un enfant peut passer 10 ans dans le ventre de sa mère. Si demain, une femme se retrouve dans ce problème, qu’elle ne se décourage pas. Dieu va l’aider. Aujourd’hui, on m’appelle «maman de 4 ans». Mais c’est une joie pour moi et pour tous ceux qui m’ont soutenue durant cette épreuve. Je remercie Dieu pour tout cela.

• Où a eu lieu ton accouchement ?

- J’ai accouché à la maternité du grand marché, non loin de la gare. Le 16 janvier 2012, vers 19 heures. Ce jour-là, il y avait du monde dans la chambre. Les gens venaient voir si c’était vrai.

• Dans quelles conditions as-tu accouché ? C’était difficile ?

- Non, non. Ce jour-là, je ne savais même pas que j’allais accoucher. Je peux dire que c’est la vieille femme Tagbana et Dieu qui m’ont aidée. Malgré les médicaments qu’elle me donnait, elle me demandait d’aller à l’hôpital pour que les agents de santé suivent l’évolution de la grossesse. Jusqu’à ce que j’accouche.

• Es-tu retournée la voir après ?

- Oui, deux jours après, je suis retournée la voir, avec ma mère. Chez elle, il y a toujours du monde. Mais quand je suis arrivée avec l’enfant et que j’ai expliqué ma délivrance, tous ceux qui étaient là étaient étonnés. Même avant et après cela, les gens continuaient à venir chez nous, à la maison. Chacun voulait voir l’enfant, voir comment il est, etc. Même actuellement, les gens continuent de venir. Souvent, des gens m’appellent pour me voir, parce que c’est, d’après eux, un miracle.

• Crois-tu que c’était un problème mystique ?

- Oui, je crois que c’était le cas. Quand j’étais enceinte, je n’ai jamais eu de rapport avec quelqu’un. Parce que si tu me voyais, j’étais devenue comme une folle. Méconnaissable. Personne n’aurait voulu de moi à ce moment. Mais je me dis même si c’est le fait de quelqu’un, c’est Dieu qui a toujours le dernier mot.

• Penses-tu à une personne qui serait à l’origine de cela ?

- Bon, au temps où je sortais avec le papa de ma fille, il entretenait une relation avec une autre fille. La fille en question n’est jamais venue me faire des palabres. Mais lorsque je suis tombée enceinte, elle racontait dans le quartier que je n’accoucherais pas de cet enfant. Elle disait que le papa de ma fille avait promis l’épouser. Mes camarades me rapportaient cela. Je ne pouvais pas imaginer que ça allait se passer comme ça. Or, dans la vie, il faut faire attention à ce qu’on dit. La parole condamne. Même si ce n’est pas elle qui est à l’origine, ce qu’elle a dit au début la fait passer pour une suspecte.

• T’arrivait-il de vivre des choses bizarres pendant ta grossesse ?

- Au niveau de la santé, il n’y avait rien de grave. C’est la nuit que je faisais des mauvais rêves. Je voyais, par exemple, des chiens ou des bœufs me poursuivre. Des fois, je me voyais au bord d’un trou et quelqu’un tentait de me pousser dedans. Heureusement, je n’y tombais pas. Je voyais aussi des serpents, etc. Mais depuis mon accouchement, je ne fais plus ce genre de cauchemars.

• Vois-tu actuellement ta «rivale» ?

- Non, non. Elle vit à Abobo Derrière rails. Je ne la vois plus au quartier, je n’ai plus de ses nouvelles. Pareil pour le papa de ma fille. Depuis que la grossesse était devenue une complication, lui aussi a disparu. Parce qu’on racontait tellement de choses me concernant.

• Au fond de toi, tu ne te reproches rien ? Un mauvais acte de ta part qui aurait entraîné tout cela ?

- Je ne pense pas, sincèrement. Je n’ai jamais fais d’avortement. Je n’ai pas fait de mal à quelqu’un, non plus.

• Depuis ton accouchement, tout va bien, côté santé ?

- En tous cas, je me sens bien. L’accouchement a été facile. Dieu merci. J’ai l’amour de ma fille. C’est incroyable, ce qui m’est arrivé. Quand je la vois, je me dis que pendant tout ce temps, elle a été là, dans mon ventre. Et j’ai fini par la mettre au monde. Tout va bien.

• Est-ce que tu as peur de faire un autre enfant ?

- Oui. Même si je me marie, je ne crois pas que je ferai un autre enfant de sitôt. Depuis que je suis née, je n’ai jamais vécu une telle souffrance. Même ma propre mère est dépassée par tout cela. En tous cas, j’ai peur de tomber à nouveau enceinte.

Leila, un enfant comme les autres ?

Née après plus de 3 ans passés dans le sein de sa mère, Leila Aminata Diaby est une enfant pas tout à fait comme les autres. Premier signe, elle n’est pas née avec des dents, comme c’est souvent le cas pour certains bébés qui naissent au-delà des onze mois de grossesse.

Aujourd’hui, elle a un an et 4 mois. «Pour son âge, elle est déjà très intelligente», disent les voisins. Dans cette cour où Leila joue avec ses amis, elle est plus dégourdie que ceux de son âge. Plus éveillée. Elle essaie déjà de se faire comprendre en baragouinant quelques mots. Elle joue, danse souvent pour amuser la cour et se fait applaudir. Leila est l’objet d’une attention particulière de la part de sa grand-mère avec qui elle passe plus de temps. Sa mère, Mariam, coiffeuse, ne la voit que les soirs lorsqu’elle rentre du travail.

«Mais mon absence ne l’inquiète pas», affirme-t-elle. La grand-mère et la maman de la petite Leila disent qu’elle n’est jamais tombée malade depuis sa naissance. Du moins, pas encore. Et comme si elle était consciente des pires difficultés vecues par sa mère durant sa grossesse, Leila semble agir pour créer le moins de soucis possibles. Née sans difficultés, sevrée à un an, la petite a l’air bien dans sa peau. Comment sera-t-elle dans 10, 20 ans ? Le temps, dit-on, est un autre nom de Dieu.

François Yéo

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