La galerie Houkami Guyzagn d’Abidjan Cocody Riviera, s’érigeant comme l’un des épicentres du rayonnement des arts visuels en Côte d’Ivoire, le confirme, à maints égards. Et notamment avec l’exposition inédite qu’elle organise avec « Deux maîtres du Vohou » : N’guessan Kra et Youssouf Bath ! Ce sera du 26 juillet au 26 août. C’est du moins ce qui ressort du déjeuner-débat organisé, le jeudi 19 juillet, en prélude à cet évènement, à la galerie-hôte, en présence des deux artistes.
En effet, depuis qu’ils ont porté sur les fonts baptismaux, de façon formelle, l’école Vohou-vohou, en 1985, après l’avoir formatée plus d’une décennie durant aux Beaux-arts d’Abidjan, c’est la première exposition que Youssouf Bath et N’guessan Kra partagent ensemble sur les bords de la lagune Ebrié. C’est un évènement majeur d’autant plus que l’un et l’autre, sont ici comme ailleurs, des figures marquantes de l’art contemporain africain, après qu’ils aient, ensemble continué leurs cursus ensemble aux Beaux-arts de Paris (France) et que Youssouf Bath soit rentré au bercail (Dabou) pour y ouvrir son atelier, sur fond d’art-thérapie ; et l’autre N’guessan Kra, demeure en France, un pinceau majeur. Au-delà de l’alléchante affiche, il importe de saluer, ainsi que le feront les deux artistes qui l’occupent, la maestria de Thierry Dia, le directeur de la galerie Houkami Guyzagn qui les réunit.
De leurs expériences personnelles et de leur regard de consciences sociales critiques, les deux artistes-plasticiens remettent sur les cimaises de la galerie Houkami, des œuvres qui datent, mais aussi, créent de nouvelles, pour faire coïncider leurs techniques, écritures picturales et profondeurs chromatiques pour évoquer leurs perceptions du phénomène migratoire. Dénoncer les mirages de l’aventure des boat-peoples des temps actuels, tout en tentant de convaincre la jeunesse que : l’eldorado, c’est ici. Et ce, à l’aune de leurs expériences respectives et croisées de ce que la diaspora peut apporter comme adjuvant, en fonction du contexte social, économique, politique, qui a guidé au départ. Le tout sur fond d’une invite à croire en son talent, pour la jeunesse, mais qui va de pair avec une formation initiale.
Esthétique de rupture, écriture d’affirmation
L’esthétique vohou-vohou et son utilisation de matériaux contrastant avec l’enseignement académique, au dire des critiques Mimi Errol et Dr Koffi Yao Célestin, marque l’évolution de l’art contemporain ivoirien. C’est, en tout cas, à les en croire, sous ce vocable qu’un groupe de jeunes peintres, dont Koudougnon Théodore, Youssouf Bath, N’guessan Kra, Yacouba Touré… a organisé une exposition en 1985. Le vohou-vohou signait ainsi officiellement son acte de naissance. Les adeptes d’alors, maîtres d’aujourd’hui que sont Bath et Kra, se réclamaient et revendiquent toujours, par la même occasion, une esthétique négro-africaine.
Les ouvres gardent la structure sur châssis de la peinture de chevalet. Mais le support habituel, la toile de lin, fait place au tapa (écorce de bois battu), à la toile de jute, au collage avec intégration de matériaux locaux comme les cauris, le rotin, le sable, etc. Les colorants acryliques et huiles font place (chez les plus réfractaires à l’utilisation de matériaux industriels) à des colorants obtenus à partir de décoction de plantes. L’esprit du groupe, selon les maîtres, qui va plus tard formaliser le mouvement prend forme aux Beaux-arts de Paris où les anciens étudiants qu’ils étaient, vont traditionnellement achever leur spécialisation, notamment dans l’atelier du peintre français Jacques Yankel, qui encourage ses étudiants ivoiriens à poursuivre sur la voie de cette esthétique négro-africaine qu’ils revendiquent.
Une option qui leur réussit bien puisque tous ceux qui travaillaient dans cet esprit ont brillamment obtenu leur diplôme. Mais plus tard, Kra N’guessan s’exile en France, Youssouf Bath voyage souvent, Koudougnon se retire dans son atelier…
Renaissance, relance, jouvence, continuité ? En tout état de cause, les amateurs d’arts, critiques et autres conservateurs et collectionneurs se feront une idée, à partir du vernissage du jeudi 26 juillet, à partir de 18h à Houkami Guyzagn.
REMI COULIBALY
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